Quand on parle des habitats types montréalais, on pense souvent aux escaliers extérieurs et à la brique rouge.
En réalité, la définition des habitats types est plus large. On parle de -Plex, de maisonnettes en rangées, de Shoebox et même de bungalows.
Je vous emmène à la découverte de ces logements qui constituent l’ADN architectural de l’agglomération.
Un Habitat Type, c’est quoi ?
À la fin des années 1800, chaque pays et surtout chaque grande ville a engendré un type d’habitation approprié aux conditions économiques de la majorité de la population.
À l’époque, en pleine industrialisation, il fallait répondre à un accroissement rapide de la classe ouvrière.
Elle avait besoin de logements abordables, à proximité des sources d’emplois, ou des transports.
À Montréal, les premiers tramways hippomobiles arrivent en 1861. Puis, le tramway électrique se développe à partir de 1892. Ce qui étend considérablement les zones habitables.
Dans chaque ville, les habitats types semblent être les moins originaux justement parce qu’ils sont les plus répandus. Mais ils constituent un symbole historique et patrimonial.
Les -PLEX : duplex, triplex & cie
Il s’agit d’habitations en rangée continue, de 2 ou 3 niveaux de logements superposés.
Le nom -plex : duplex, triplex, quadruplex (…) correspond au nombre de logements et non pas au nombre d’étages.
La façade, le plus souvent en brique, est munie de balcons, de galeries et d’escaliers extérieurs.
Les lucarnes et corniches sont les seuls éléments décorés des façades plutôt sévères et classiques.
Les pièces sont alignées dans le sens de la profondeur de l’immeuble. Cette caractéristique qui permettait d’optimiser le nombre de lot, en est le principal défaut.
En effet, la lumière et la ventilation naturelles de ces habitations sont souvent médiocres.
Les duplex
Les premiers duplex à toits plats sur deux niveaux sont construits sur un carré en bois avec un revêtement de brique en bordure immédiate du trottoir. Leur façade est simple et sans balcons.
Elle compte deux portes côte à côte : l’une donnant accès au logement du rez-de-chaussée, l’autre au logement de l’étage par un escalier intérieur.
De manière générale, c’est « Chacun sa porte ! ». Les institutions religieuses ne sont pas étrangères à ce phénomène, considérant les couloirs communs de distribution comme des lieux propices à la promiscuité…
Habituellement les duplex sont sur 2 étages, lorsqu’il y a 3 étages c’est souvent que les 2 étages du haut ne forment qu’un seul logement.
Au début des années 1900, pour gagner de l’espace, l’agglomération impose un retrait par rapport au trottoir. Cette nouvelle règlementation fait sortir les escaliers des logements.
Cette modification change totalement l’esthétique des façades des habitats-types.
Les Triplex
Comme leur nom l’indique ces logements présentent une superposition de 3 habitations disposées sur 3 niveaux, ou avec le second étage découpé en deux logements.
Je n’ai abordé jusqu’ici que les duplex et les triplex. Mais il existe toutes sortes de variantes sur l’agglomération. On peut notamment trouver des quadruplex ou des quintuplex sur deux ou trois niveaux.
LEs maisons shoebox
Lors du développement des trains de banlieue, des familles ouvrières se sont éloignées des quartiers centraux insalubres pour acquérir ces petits lots.
Les maisons shoebox sont de petits bâtiments résidentiels caractérisés par leur toit plat
et le fait qu’ils possèdent un seul étage.
Le nom « shoebox » vient de leur petit gabarit qui évoque celui d’une boîte à chaussures.
Ces maisons possèdent quelques éléments architecturaux caractéristiques :
- une porte située au centre de la façade et deux fenêtres distribuées de façon symétrique de chaque côté de celle-ci;
- des façades généralement en brique et possédant un couronnement, détail architectural décoratif qui orne la partie supérieure du bâtiment, tel une corniche ou un parapet;
- souvent, une galerie en façade surplombée d’une marquise.
On retrouve encore de nombreuses Shoebox dans le quartier Rosemont-La Petite-Patrie.
Afin d’encadrer les rénovations ou les démolitions de ces maisons, elles ont été inventoriées et classées en fonction de leur valeur architecturale.
Sur les dernières décennies, ces maisons tendent à être agrandies par l’ajout d’un étage supplémentaire. Afin de préserver le caractère architectural de la Shoebox, cette extension doit préserver la façade initiale.
Les maisonnettes en rangées
Déjà réservés à une classe supérieure, ce sont des logements sur 3 niveaux.
Ces maisonnettes comprenaient à l’origine les activités domestiques au sous-sol, les pièces de vie au rez-de-chaussée et les chambres au 1er étage.
Dans leur évolution, il est courant que le sous-sol devienne un petit logement indépendant. Une modification très répandue dans ce type d’habitation, sur l’ensemble de l’agglomération.
Les Bungalows
Loin de la définition du modèle de camping français, le bungalow désigne une maison unifamiliale de banlieue sur un niveau.
Dans l’après-guerre, ce type de maison deviendra le symbole de la banlieue moderne.
Ce type de résidence est commun dans les quartiers Mercier, Tétreaultville, Mont-Royal, Saint-Laurent ainsi que dans des municipalités de banlieue comme Longueuil ou Saint-Lambert.
Et les escaliers alors ? Intérieur ou extérieurs ?
Comme évoqué plus haut, un retrait d’une dizaine de pieds par rapport au trottoir a été imposé au début des années 1900. Sortir l’escalier est devenu une solution pour permettre un gain de place.
Mais aussi, les escaliers intérieurs, en plus de la perte de place, sont des vecteurs de déperdition de chaleur.
La sortie des escaliers permet également de créer un porche avec le balcon du niveau au dessus.
Cependant, la ville en interdit la construction dans les années 40. Ils sont selon certains une source d’enlaidissement et trop dangereux en hiver à cause de la neige et de la glace.
Dans les années 80, ils sont à nouveau autorisés sous certaines conditions. Ces nouvelles règles sont notamment liées à l’angle et la taille des marches tournantes. Aussi, dans la mesure du possible, on favorise les escaliers droits.
Au delà de leur dangerosité l’hiver, il est courant que les escaliers tournants passent devant une fenêtre du premier niveau. Bien qu’ajourés, ils diminuent drastiquement l’entrée de la lumière dans des logements déjà sombres.
La toiture, on en parle ?
Les 3 types de toitures les plus représentées sur l’agglomération sont :
- Plat
- Composite
- Mansardé
Dans cet article, déjà bien long me dit-on, je ne vais aborder que les toits plats qui sont ceux les plus représentatifs des logements de la classe ouvrière.
À Montréal, les toits plats se développent à partir de 1875.
L’étanchéité est assurée par une membrane composée de plusieurs couches de papier goudronné recouverte de graviers et remontant sur un parapet construit au sommet des murs.
On parle de toit plat, mais en réalité ils sont légèrement en pente. L’écoulement de l’eau se fait par un drain central traversant chaque bâtiment et relié à l’égout municipal.
Le toit plat évite de déverser l’eau, la neige et la glace chez le voisin ou sur la voie publique.
Ce type de construction permet de réduire les coût de construction, mais offre également des économies de chauffage.
En effet, un toit plat n’a pas la prise au vent des mansardes et la neige qui s’accumule en hiver devient une couche isolante.
En plus de retenir les accumulations de neige, de glace et d’eau, le parapet permet de créer des couronnements à l’ornementation variée.
Le principal défaut vient de la toile goudronnée. Dans le temps, exposé au soleil et aux changements brusques de températures, le goudron contenu dans la membrane à tendance à durcir et à la rendre plus vulnérables aux infiltrations d’eau.
Elles sont aujourd’hui remplacées par des membranes élastomères plus flexibles et plus résistantes.
Aussi, elles n’ont pas besoin d’être chauffées comme les produits d’asphaltes, et produisent moins d’émanations toxiques.
En conclusion…
Il y aurait encore beaucoup à dire sur les habitats types montréalais ! Je n’ai par exemple pas abordé l’arrière de ces logements avec leurs cours, hangars, galeries, ruelles…
Mais j’espère tout de même vous avoir appris un peu sur la diversité architecturale de l’agglomération.
Pour écrire cet article, je me suis beaucoup appuyée sur mes livres de Montréal, vous pouvez en trouver la liste dans mon article dédié.
Pour cet article, mes autres sources :
- Le blogue d’héritage Montréal, et leur article « Quelle est la personnalité de votre maison ? »
- Le profil Instagram de Myriam, Passion Montréal, qui est une mine d’or
- La publication « Les Plex une tradition renouvelée »
Je vous remercie de m’avoir lue jusqu’au bout !
À très vite pour de nouveaux articles de coulisses !!
The Comments
Coeur
Bravo pour cet article! Plein d’éléments que je ne connaissais pas en terme d’histoire et d’architecture ! Merci du partage!
Berangere
> CoeurMerci Coeur pour ton retour sur cet article !